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Capsule Design #05 : Le rôle du design dans l’écoconception

Capsule Design #05 : Le rôle du design dans l’écoconception

Dans cette nouvelle Capsule Design, Yohan interroge Damien sur les outils existants ou développés à l’agence, à la disposition des designers UX/UI pour mieux écoconcevoir, et ce, dès le début d’un projet.

Publié le 01 juin 2023

Bonjour à tous et à toutes et bienvenue dans cette nouvelle Capsule Design de Salut les Designers, le podcast de l’Agence LunaWeb !

Aujourd’hui, Yohan et Damien, reviennent sur les leviers de design UX/UI disponibles en amont, mais aussi pendant un projet pour mieux écoconcevoir une interface. L’occasion de parler des méthodes originales développées à l’agence, mais aussi du RGESN, Le Référentiel Général d’Écoconception de Services Numériques.

Bonne écoute à tous et à toutes,

Les Designers de l’Agence LunaWeb.

La transcription

Yohan : Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans ce nouvel épisode “Capsule Design” de “Salut les Designers”, le podcast de l’Agence LunaWeb !

Dans ce format court, nous partons à la découverte de différentes thématiques du design UX en compagnie d’un membre de l’Agence.

Pour ce cinquième épisode de notre série, j’ai le plaisir de recevoir mon collègue Damien Legendre, UX et UI Designer et avec qui nous parlerons aujourd’hui d’écoconception web.

Salut Damien, comment ça va ?

Damien : Salut Yohan ! Et bien ça va très bien, merci.

Yohan : Avant de nous lancer dans le vif du sujet, peux-tu te présenter et nous expliquer ce que tu fais à l’agence en quelques mots ?

Damien : Et bien comme tu l’a dit plus tôt, je suis UX & UI designer. J’anime également le pôle UX de l’agence ; Une super équipe de 7 designers et UX researchers.

Yohan : Merci Damien. Aujourd’hui, j’aimerais que tu nous parles d’écoconception web. 

On sait bien que de leur côté, les développeurs peuvent optimiser leur code en évitant, par exemple, les surcouches de code inutiles, en optimisant les formats d’images ou en choisissant des hébergements “verts”. 

Mais finalement, est-ce que nous, designers, pouvons faire quelque chose côté écoconception ?

Damien : Alors effectivement, on entend souvent, que le cœur de ce qui est à faire en termes d’écoconception réside dans l’expertise des développeurs. C’est vrai, mais c’est aussi faux.

Quand on lit les 115 bonnes pratiques de l’écoconception web, l’un des ouvrages références en la matière écrit par Frédéric Bordage, on ressent fortement qu’il y a beaucoup à faire du côté du développement. Pourtant, c’est oublier que ce sont les designers qui après avoir rassemblé les connaissances suffisantes à la conception bâtissent une grande partie de l’architecture du service. Si durant la phase de conception sont embarqués une quantité de composants lourds voir inutile, c’est de notre responsabilité.

Penser que seuls les développeurs ont un impact en écoconception, c’est oublier que la responsabilité des designers est de peser le pour et le contre lors de l’intégration de composants d’interface.

Toujours grâce au livre de Frédéric Bordage, on apprend qu’environ 45% des fonctionnalités demandées ne sont jamais utilisées, et 70% ne sont pas essentielles. Ce chiffre vertigineux en apparence ne me fait pas tomber de ma chaise en réalité.

Chaque projet contient son lot de fonctionnalités ou contenus discutables. Ça s’explique souvent parce que l’on veut simplement se faire plaisir sur le projet, ou encore parce qu’on a pas suffisamment pris le temps d’évaluer l’intérêt de ces fonctionnalités ou contenus.

Chaque projet contient son lot de fonctionnalités ou de contenus discutables, parce que l’on a pas suffisamment pris le temps d’en évaluer l’intérêt.

Je ne jette la pierre à personne, nous sommes un peu tous responsables de ça. Et pour le coup le designer peut être celui ou celle qui va guider l’équipe projet sur ces aspects grâce à des méthodes adaptées.

Yohan : D’accord mais du coup, comment le designer peut guider l’équipe de conception ?

Damien : Dès le début du projet, le designer à ce rôle, à mon sens, de facilitateur lors des ateliers d’idéation et de co-conception. C’est lui qui doit proposer des séances de réflexion collective qui vont permettre à chacun de lâcher toutes ses idées pour le projet. Une fois que tout le monde s’est exprimé, on va réduire ensemble la voilure à ce qui est strictement essentiel pour l’utilisateur. Je parlais de certaines de ces méthodes, comme la méthode C.O.E.U.R ou le design studio lors de la Capsule n°2 ; Écoconcevoir avec les ateliers d’idéation, que vous pouvez réécouter.

Dès le début du projet, le designer à ce rôle de facilitateur lors des ateliers d’idéation et de co-conception.

En ce qui me concerne, j’essaie de trouver ou d’inventer des méthodes pour justement faciliter ce genre de phases clefs du projet où il faut permettre de statuer d’un périmètre raisonnable et efficace sans frustrations. Depuis plusieurs mois, nous travaillons par exemple sur la création originale d’une nouvelle méthode qui se montre très efficace en atelier d’écoconception. Pour le moment on a nommé cette méthode : modèle de convergence essentiel. Mais je suis sûr qu’on trouvera mieux.

En tout cas, cette méthode permet de bâtir le périmètre d’un service à partir des besoins concrets des usagers et les objectifs des porteurs de projets en les amenant à catégoriser leurs idées selon des critères d’importance. Cela permet en finalité d’extraire l’essentiel de ce qui constitue le service final.

J’aurai l’occasion d’en reparler prochainement je pense, les premières applications sont en tout cas probantes. Nous venons de l’appliquer par exemple fin 2022 avec l’équipe de Rennes Métropole afin de définir les justes contours d’un de leurs outils web que nous présenterons prochainement.

Depuis plusieurs mois, nous travaillons à la création originale d’une nouvelle méthode dite “modèle de convergence essentielle” qui se montre très efficace en atelier d’écoconception.

Ce qu’il faut retenir à travers cet exemple anecdotique, c’est qu’il ne faut pas hésiter à tester ses propres méthodes, du moment qu’on arrive à répondre aux objectifs du projet tout en étant plus raisonné dans son périmètre.

Yohan : Donc utiliser des méthodes qui permettent d’en faire moins ou en tout cas mieux ?

Damien : C’est exactement ça. On entend souvent en design : “faire simple, c’est compliqué”. C’est tout à fait vrai pour l’écoconception également. Faire simple c’est parfois devoir accepter la frustration de ne pas aller au bout de certaines de ses idées ou fantasmes de base.

À mon avis c’est surtout l’occasion de proposer quelque chose d’efficace. Regardons les interfaces que nous utilisons le plus et à quel point elles sont souvent simples : Forcément, il y a la recherche Google que je ne présente plus mais aussi Trainline à ses débuts qui a démontré à quel point un design simple et direct pouvait venir concurrencer la billetterie web de la SNCF, un service en place pourtant ultra identifier.

“Faire simple, c’est compliqué”, c’est tout à fait vrai pour l’écoconception, c’est parfois devoir accepter la frustration de ne pas aller au bout de certaines de ses idées ou fantasmes de base. 

Je pense aussi au parcours de souscription à l’assurance Luko, léger avec estimation et souscription à la clef en très peu d’étapes. Idem pour la barre de recherche AirBnB qui focalise la recherche sur trois critères qui suffisent à définir son projet de séjour : où, quand et avec qui ? Le simple, ça se réfléchit et ça en passe par des choix forts. Faire simple, c’est compliqué et surtout ça se réfléchit et ça s’expérimente !

Yohan : Effectivement, mais du coup, sur quoi devons-nous se baser lors de l’idéation pour faire ces choix ? J’imagine bien qu’on ne fait pas ça à l’instinct ?

Damien : Non évidemment. L’expérience des designers va les guider, mais c’est parfois un faux ami dont il faut se méfier.

C’est principalement la recherche utilisateur, mais aussi les études de flux grâce aux outils de tracking comme Matomo ou Google Analytics qui sont les vrais indicateurs de ce qui est essentiel à réaliser. 

A contrario, ils éclairent sur ce qui est à écarter. Et ça, c’est très intéressant également. Sans données issues des usagers, on en reste à la méthode du doigt mouillé. À mon sens, l’UX research est au cœur de l’écoconception c’est clair.

Yohan : Du coup il y a un gros travail de compréhension du périmètre dès le début du projet.

Et pour la suite ? Lors de la phase de maquettage, le designer peut-il encore contribuer à l’écoconception ?

Damien : Complètement. Et nous avons la chance depuis 2021 d’avoir accès au RGESN. Le Référentiel Général d’Écoconception de Services Numériques, qui nous guide beaucoup là-dessus. Ce référentiel a été mené dans le cadre de la mission interministérielle numérique responsable et co-pilotée par la Direction interministérielle du numérique (DINUM), le Ministère de la Transition Écologique, l’ADEME et l’Institut du Numérique Responsable.

Ce référentiel se découpe en 8 sections, dont l’une sur l’UX et l’UI qui nous concerne complètement.

Nous avons la chance depuis 2021 d’avoir accès au Référentiel Général d’Écoconception de Services Numériques, qui nous guide beaucoup.

Par exemple, il nous éclaire sur les bonnes pratiques d’écoconception relatives aux médias vidéo, à nous poser la question de les utiliser qu’en cas d’intérêt avéré ou encore de bannir l’autoplay par exemple. Les vidéos étant par nature un média lourd et nécessitant le plus souvent des requêtes à des médias de streaming comme Youtube et Viméo, en faire l’économie et trouver des alternatives est très puissant.

Cette section UX & UI du RGESN nous sensibilise aussi sur l’impact du choix des typographies. Une typographie communément installée sur la majorité des OS comme la Arial, ou la Georgia va drastiquement réduire le poids d’une page web. Le guide d’écoconception des designers éthiques, une autre ressource très intéressante pour le design écoconçu, nous explique par exemple que le poids moyen d’une police web représente 6% du poids d’une page web en moyenne. Une police pré-installée sera donc forcément beaucoup moins lourde à charger. L’idée n’est pas de mettre des polices systèmes partout, mais pourquoi pas relativiser certains choix, notamment pour les polices de corps de textes parfois. C’est en tout cas un des nombreux leviers que l’on peut actionner ou non en éco-design.

On peut également y retrouver des critères en lien direct avec le Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité, comme le contrôle des animations par l’utilisateur qui permet de réduire les ressources.

On peut également y retrouver des critères en lien direct avec le RGAA (le Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité), comme le contrôle des animations par l’utilisateur, ce qui porte le double intérêt de réduire la consommation de ressources, mais également de rendre un meilleur service à des personnes en situation de déficience visuelle notamment..

Et ce ne sont que des exemples parmi beaucoup, beaucoup d’autres, que vous pouvez retrouver dans ce RGESN ou encore le guide d’écoconception des designers éthiques pour ne citer que ceux-là. D’ailleurs pour le RGESN allez il est important d’en consulter toutes les sections et pas uniquement celle sur l’UX et l’UI. Il y a en réalité à prendre de chaque catégorie pour les designers web. Par exemple, à Luna, nous en avons extrait de chaque section afin d’alimenter notre checklist design appliquée à chacun de nos projets.

Yohan : C’est vrai qu’il y a pas mal de choses à prendre à notre compte. On remettra d’ailleurs les références dont tu parles, en lien dans la transcription de l’épisode pour que les auditeurs puissent y accéder facilement. 

Pour finir, Damien, est-ce que tu peux nous partager un retour sur expérience d’un projet écoconçu sur lequel tu as pu mettre en œuvre ces méthodologies ?

Damien : Les sujets autour de l’écoconception ne manquent pas en ce moment et c’est vraiment génial. On sent que ça inspire positivement les porteurs de projets.

Et du coup, je suis en ce moment également sur le bouclage du design du projet écoconçu avec Rennes Métropole dont je vous parlais plus tôt. Un projet mixant d’ailleurs écoconception et conformité RGAA, deux thématiques qui se recoupent beaucoup.

Les sujets autour de l’écoconception ne manquent pas en ce moment, on sent que ça inspire positivement les porteurs de projets.

Nous réalisons avec eux un brandbook. C’est un guide de marque disponible en ligne, qui regroupe l’ensemble des éléments de leur nouvelle identité visuelle refondue en 2022. Autant dire que c’est un service nécessaire pour eux, mais qui peut se révéler potentiellement complexe et gigantesque en termes de contenus. Pourtant leur équipe affiche depuis l’avant-projet l’ambition de proposer un service le plus sobre possible. C’est le cas pour l’ensemble de leurs futurs services d’ailleurs.

Alors, nous avons commencé par rassembler l’équipe de conception et des utilisateurs pour les interroger sur leurs besoins concrets, afin de bâtir un périmètre adapté et sans fonctionnalités peu, voir pas du tout nécessaires.

Nous réalisons en ce moment un brandbook pour Rennes Métropole, avec dès le départ l’ambition d’être le plus sobre possible. Une démarche qui touche l’ensemble de leurs futurs services.

La plus puissante des manières pour réduire un périmètre à son essentiel reste de questionner finement et avec méthode les usagers et porteurs du projet. On évite ainsi les fameux 45% de fonctionnalités qui ne sont jamais utilisées, que l’on évoquait en début d’épisode. Une fois le périmètre taillé sur-mesure, on va appliquer les règles de conception en design à partir de notre checklist design construite inspirée du RGESN ou du guide d’écoconception des designers éthiques dont je vous parlais plus tôt.

Yohan : Merci beaucoup Damien pour ce partage, concret et pour ces pistes afin de se lancer dans le design web écoconçu. J’espère que ça donnera envie à celles et ceux qui nous écoutent de tester de nouvelles façons de concevoir le web.

Si ce sujet lié à l’écoconception vous a plus, vous pourrez écouter ou ré-écouter nos précédents épisodes abordant ce sujet.

En attendant le prochain épisode, n’hésitez pas à vous abonner à la newsletter du podcast pour retrouver l’ensemble des ressources de nos épisodes, les tips et conseils de nos invités ! C’est sur le site salutlesdesigners.lunaweb.fr que ça se passe. 

À très bientôt !

Découvrez tous les mois un nouvel épisode de Salut les Designers consacré au design et à ses méthodes. UI, UX, motion, accessibilité, écoconception, recherche, nous échangeons avec des professionnel·le·s passionné·e·s au grès de nos rencontres pour mieux comprendre leurs méthodes de conception centrée utilisateur.

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