SLD# 14 - Emmanuelle Marévéry, Consumer Sciences Manager

De son parcours chez Decathlon à la création du diagramme “Café”, nous revenons avec Emmanuelle Marévéry sur ce qui fait son quotidien en tant que consultante UX, sa vision de l’expérience utilisateur et de ses valeurs.

Vous découvrirez ses tips pour adopter la bonne attitude quand on “fait de l’UX”, l’importance de bien définir les objectifs business d’un projet et les façons d’améliorer son workflow au quotidien ! Pour les plus curieux, Emmanuelle a eu la sympathie de nous partager le support de sa dernière conférence.

Bonne écoute à tous et à toutes, nous sommes ravi·e·s de vous retrouver pour de nouveaux épisodes de Salut les Designers !

La retranscription de l’épisode

Guillaume Genest : Bonjour à tous et à toutes et bienvenue dans ce nouvel épisode de Salut les Designers !

Aujourd’hui dans le cadre des UX Days 2019 de l’association Flupa, je suis en compagnie d’Emmanuelle Marévéry pour ce nouveau numéro.

Trente minutes ensemble sur les questions de l’UX et du coup première question, je vais te demander de te présenter pour celles et ceux qui ne te connaissent pas !

Emmanuelle Marévéry : Bonjour, je suis Emmanuelle Marévéry. Je suis consultante et formatrice en expérience utilisateur depuis quelques années déjà et j’ai un background d’ingénieur, designer et psychologue.

Aujourd’hui j’exerce dans différentes entreprises en tant que consultante, plutôt sur des actions coup de poing. Je vais intervenir 2, 3, 4 jours maxi pour débloquer des situations.

Je suis spécialisée dans les activités de loisirs puisque je suis passée chez Decathlon, Ubisoft et Asmodée. Dans ces activités autotéliques, ce qui est assez intéressant c’est qu’en fait on s’intéresse à donner plus de plaisir à des utilisateurs, donc les notions d’engagement, de motivation et de plaisir sont vraiment centrales. C’est ce qui me plaît c’est en gros donner encore plus de plaisir aux gens.

G : Tu l’as évoqué à l’instant, tu as un bagage assez complet, est-ce que tu te souviens de ce qui t’a donné envie de t’intéresser à l’expérience utilisateur, à cette dynamique là, initialement ?

E : Je m’en souviens très bien parce que ça m’a marqué et dix ans plus tard j’y pense encore ! J’étais ingénieur et en fait entre nous, entre collègues, on trouvait que les décisions qui étaient prises n’allaient pas dans le sens de l’utilisateur.

Nous étions hyper frustrés parce que nous nous occupions de développer des produits et nous savions, avant qu’ils ne sortent, qu’ils n’allaient pas marcher.

C’est souvent une personne qui prenait la décision pour toi à Decathlon et nous, on était hyper frustré parce qu’on s’occupait de développer les produits et on savait, avant que le produit ne sorte, que ça n’allait pas marcher.

Un jour, en faisant une étude auprès des clients, on s’est vraiment pris un retour de la part des utilisateurs, comme quoi ce qu’on allait proposer, ça n’allait vraiment pas. Et ça, ça a été le déclic pour moi.

J’ai décidé d’essayer de mener pleins d’initiatives au sein de Decathlon pour qu’on écoute enfin la voix des utilisateurs. Donc avec pleins d’autres collègues qui étaient aussi là dessus, ça a été le déclic.

Se rendre compte que tous ensemble on savait que c’était un mauvais produit et qu’on le faisait quand même parce qu’on n’écoutait pas nos utilisateurs. Ça m’a marqué.

G : Dix ans plus tard, tu es satisfaite de l’avancée sur ces réflexions ?

E : Je suis super satisfaite parce que maintenant c’est un vrai métier. L’expérience utilisateur il y a 10 ans, on n’en parlait quasiment pas et aujourd’hui on voit l’engouement qu’il y a, les boîtes qui commencent à recruter, moi je trouve ça génial. Ça me motive encore plus à faire mon boulot et c’est super.

On en est même à un stade où ça devient tellement mature que les boîtes qui y sont investies ont des réflexions du type “Est-ce qu’on continue ou pas ?”. Moi ça me dérange un petit peu, ça m’alerte un petit peu.

Chez Decathlon, les tests utilisateurs qui étaient obligatoires il y a deux ou trois ans deviennent maintenant optionnels. Donc il y a aussi, même avec cet engouement là, le risque que dans quelques années on se demande “Qu’est-ce que devient mon métier ?”.

Ce sont des enjeux qui sont super passionnants et sur lesquels je suis ravi de bosser au quotidien.

G : Aujourd’hui on est à Flupa, donc l’UX on le voit partout sur les murs, les gens en parlent et ça commence à être démocratisé, en tout cas au niveau du terme. Mais ça peut aussi vouloir dire plein de choses finalement, dans la bouche de certaines personnes.

C’est quoi pour toi aujourd’hui ta définition de l’UX ?

E : Je le disais dans ma conférence, il n’y a pas d’avis aujourd’hui, de définition consensuelle qui plaira à tout le monde. Il y a ceux qui viennent du web, qui voient plutôt l’UX comme l’UI, un même métier, en tout cas un même cœur de métier.

Je ne vois pas forcément l’UX comme un métier mais plutôt comme une philosophie de travail.

Moi j’ai une vision très pragmatique des choses. L’expérience utilisateur, ça veut dire ce que l’expression veut dire : s’intéresser à ce que vit un utilisateur, qu’il soit confronté à une marque, un magasin, une exposition, un service. Les applications et les interfaces sont juste une façon de s’intéresser à l’expérience utilisateur.

Je ne le vois pas forcément comme un métier mais plutôt comme une philosophie de travail.

J’ai du mal à dissocier l’expérience utilisateur de la stratégie User Centric. J’ai beaucoup de mal là dessus, du coup moi j’aime plutôt les métiers spécialisés comme le User Researcher, c’est plutôt comme ça que je vais en parler. Le concepteur d’interface, etc.

J’aime bien utiliser des mots spécifiques plutôt que de dire “UX”, qui pour moi fait plutôt appel à une philosophie de travail.

G : Oui, on peut imaginer effectivement que demain – presque – le terme disparaisse pour être totalement intégré à la réflexion qu’on peut avoir dans notre travail.

Dans ton profil professionnel un peu “autonome” de consultante, c’est quoi ta journée type ? Est-ce que tu as une journée type, si on peut imaginer une journée un peu fantasmée ou représentative ?

E : Oui, alors je n’ai pas vraiment de journée type…

G : J’imagine !

E : Tu l’as très bien dit, comme je fais de petites actions de quelques jours, c’est à chaque fois différent.

En fait je suis quelqu’un qui n’aime pas refaire les choses que je sais déjà faire. Je suis assez senior et j’aime vraiment les projets qui sont hyper compliqués et impossibles.

Donc ma journée commence toujours par une grosse prise de tête, un casse tête et puis je vais essayer, pendant que mes neurones sont encore en éveil – juste après le café – de vraiment décortiquer un sujet dans ma tête.

Ensuite je fais souvent un échange avec mes clients, pour voir. L’idée que j’ai du projet, la manière dont on pourrait travailler, ce que l’on peut débriefer. Ensuite en général l’après midi je met en œuvre, que ce soit un test utilisateur, une recherche, des préconisations ou des propositions. Ça ressemble un petit peu à ça.

Et vu que j’aime bien travailler 24h/24, le soir en général je le dédie à faire de la recherche à mon compte, parce que je suis curieuse de tout. Comme je le disais tout à l’heure, regarder des webcams un peu partout dans le monde, regarder ce qui est dit, m’immerger dans le monde de l’utilisateur.

Ce que j’adore dans ce métier, c’est que c’est une source infinie d’apprentissages. C’est ce qui me stimule le plus.

J’adore être toujours surpris par les utilisateurs, comment se comportent les gens et moi j’aime ce moment là. Donc je passe pas mal de temps aussi à faire de la veille, à regarder ce qui est fait ailleurs.

G : Par curiosité, tu es plutôt en télétravail où tu te déplaces dans ces missions chez tes clients plusieurs jours de suite ? Ça se passe comment ?

E : Alors moi je télétravaille beaucoup. Parce qu’aujourd’hui on a les technologies qui permettent de le faire très bien et puis comme je vis sur Montpellier, que mes clients sont sur Paris, ce serait difficile à concilier.

J’aime bien cette notion de télétravail parce qu’elle me laisse le temps de digérer. On n’a pas tous la même façon d’appréhender un projet. Moi j’aime bien arriver chez mon client en ayant bien digéré le projet pour pouvoir l’aider au mieux et ne pas être là à côté, pour faire acte figurine, mais arriver vraiment pour être efficace.

Donc quand je viens à Paris en général ça dépote. On fait des journées de workshop, des fois jusqu’à 22h, 23h parce qu’on se régale. Et du coup ça crée plutôt des moments intenses où on se concentre sur quelque chose et le reste du temps, toutes les équipes tentent de digérer, puis on se remet à travailler ensemble.

J’aime bien le télétravail parce qu’il me laisse le temps de digérer les informations récoltées sur mes projets.

Moi j’aime bien ce côté là un peu sprinté de mes projets.

G : Tu viens de le dire mais tu interviens auprès d’équipes diverses et variées.

Est-ce que tu as des conseils pour diffuser ces méthodes de conceptions centrée utilisateurs auprès de ces équipes ?

E : Petit un déjà, ne pas utiliser de vocabulaire anglais technique sur le métier mais utiliser un vocabulaire simple pour ne pas faire croire que c’est compliqué ce qu’on fait.

Le deuxième conseil, c’est de se dire que ce n’est pas nous les chefs et qu’on ne sait pas forcément nous mêmes ce que pensent nos clients. Ce n’est pas parce que c’est notre métier qu’on sait. Il y a un biais très fréquent en psychologie, c’est que plus on s’y connaît sur un sujet, plus on fait davantage confiance à nos intuitions qu’aux résultats, parce qu’on se croit expert de la connaissance utilisateur.

Ça fait 10 ans que je fais ce métier, je n’ai pas la prétention de savoir ce qui se passe dans la tête des gens ni d’anticiper ça. Donc je reste modeste par rapport à ce que je sais et ce sont toujours les résultats qui priment.

Donc je suis plutôt une facilitatrice, une accompagnatrice sur la recherche utilisateur.

Ça fait 10 ans que je fais ce métier et je n’ai pas la prétention de savoir – ni d’anticiper – ce qui se passe dans la tête des gens, je reste modeste.

Encore une fois la partie sur les résultats et les KPIs, pour moi c’est ça qui va vraiment amener tout le monde à adhérer aux méthodes.

Quand on a montré que ça marchait, quand on a montré que c’était concret, c’est là en général que ça va pérenniser longtemps dans l’entreprise. Si on fait juste que communiquer sur ce qu’on fait, je pense que ce n’est pas suffisant, même si c’est très important de le faire.

G : Ok oui, être dans l’action, faire les choses.

E : Être dans le faire et dans le faire avec. Ce matin en conférence, il y avait des explications sur la manière d’amener les équipes à faire des tests utilisateurs avec nous, ça j’y crois beaucoup. Mais moi j’aime bien les faire faire.

C’est à dire que c’est eux qui font les questionnaires avec moi, et il y a une transmission parce qu’en tant que consultante, je ne suis là que quelques jours et je veux que ce travail soit pérennisé au sein de l’entreprise. Donc j’aime bien accompagner et être plutôt là en mentoring.

Je préfère d’ailleurs ce métier de mentor et d’accompagnatrice plutôt que de faiseuse parce que ce sont les gens qui connaissent les produits qui en ont la meilleure connaissance au final.

G : Transition toute trouvée, quel bagage, quelles qualités il faut avoir aujourd’hui pour être un bon UX designer ?

Les profils sont divers et variés mais parmi les gens qui nous écoutent il y a des étudiants notamment.

Qu’est ce qu’on peut donner comme conseils à tous ces gens qui demain vont postuler à des postes UX, c’est quoi les qualités pour toi ? 

E : Alors pour moi la première qualité c’est être humble. Souvent je vois beaucoup de publications, notamment sur Linkedin, de personnes qui ont lu un article sur les biais cognitifs et qui, deux ou trois jours après, se disent “C’est bon, je sais prendre en compte les biais cognitifs dans mes expériences”.

Moi ça me fait hérisser les poils parce que même si on les connait, on ne peut pas les contourner, on peut juste les appréhender un petit peu.

L’illusion de détenir la connaissance, c’est vraiment un péché qu’ont beaucoup d’UX designers sur les réseaux sociaux. Il faut rester humble.

C’est le premier conseil, rester humble. Le deuxième conseil que je donnerais c’est de cibler sa curiosité.

Parce que forcément on est sur des gens en général, des profils qui sont très curieux et qui veulent tout savoir. Et en fait, face à la multitude de choses qu’il faut savoir pour comprendre l’être humain, on a vite fait de se perdre, de s’égarer dans des voies et de croire qu’on comprend et de pas être solide.

Donc il faut vraiment canaliser sa curiosité et se dire “Tiens ce mois-ci je me focuse sur tel sujet”.

Par exemple moi, le mois dernier je me suis focalisé sur les profils HPI, des personnes qui ont un haut quotient intellectuel, le mois d’avant c’était sur les autistes, le spectre autistique de façon générale et le mois d’avant c’était sur la latéralité (en gros pourquoi notre bras droit est notre bras droit et notre bras gauche, le gauche), des questions qui sont problématiques.

J’aime bien plutôt consacrer beaucoup d’efforts à déblayer une problématique du début jusqu’à la fin.

Troisième conseil que je donne souvent à des juniors c’est de s’entourer. Moi je ne sais rien faire toute seule. J’ai besoin de mon réseau d’experts et je suis très bavarde, ça va vite.

Dans l’UX, les gens sont super partageur et chaque mois tu rencontres des gens qui ont des milliers d’informations hyper utiles à te donner. Moi je crois beaucoup au partage et à l’échange pour apprendre et sans ce réseau d’experts je ne saurais pas faire mon boulot correctement aujourd’hui.

Ce sont les trois conseils que j’ai à donner.

G : Et dans cette dynamique là, est-ce que tu as toi-même une démarche d’amélioration ?

On dit souvent “faire de la veille” ou des choses comme ça, mais ça peut prendre plein plein de formes différentes finalement.

Tu parlais de faire de la recherche en perso, est-ce qu’il a des choses que tu cultives comme ça, dans ton jardin d’inspiration ?

E : Je suis une vraie névrosée de l’optimisation, c’est mon côté ingénieur (rire). En gros, je suis toujours dans l’optimisation des projets. Quand je travaillais chez Décathlon j’étais tout le temps en train d’essayer d’optimiser la moindre seconde que je passais sur n’importe quel projet, je suis une psychopathologie de ça.

Du coup forcément ça va me prendre aussi beaucoup temps.

Je crois beaucoup qu’investir quelques heures pour optimiser ses outils, son workflow, fait gagner énormément de temps ensuite.

Donc je prend beaucoup sur mon temps pour essayer d’optimiser les méthodes. Comme ça quand j’ai une question que vont me poser cinquante mille personnes j’ai déjà des slides envoyer, des choses toutes prêtes.

Par exemple pour tous mes workshop, j’ai déjà des templates qui sont prêts. Donc quand je fais une prestation, c’est déjà tout fait.

J’ai des fichiers Excel où je note toutes les questions que j’ai déjà posées à des utilisateurs, ce qui me permet, au moment où je vais recréer un questionnaire, d’avoir déjà toutes les questions et tous les items de réponses de disponibles quelque part.

Je vais consacrer aussi beaucoup de temps à améliorer mes outils, ça c’est hyper important pour moi.

Dans mon fichier Excel sur toutes les questions, je vais aussi chopper des questionnaires qui sont diffusés. Il y a un excellent bouquin qui s’appelle “Comportement du consommateur”, dedans il y a des centaines de questions déjà toutes faites, déjà calibrées, déjà validées. Et bien je vais me servir de ça, je ne vais pas réinventer l’eau chaude.

Donc en gros, ce que je passe beaucoup de temps à faire, c’est d’essayer d’organiser toutes les infos que j’ai, tous les supports que j’ai pour être efficace. Donc ça c’est sur l’aspect organisationnel, j’aime bien faire ça.

Après sur l’aspect “Comment je m’améliore moi”, et bien j’aime me confronter aussi avec des pairs, avec les experts avec qui j’échange.

J’ai fait des sessions de mentoring l’an dernier en petit comité, on était cinq, donc bénévolement, je ne cherche pas à me rémunérer là-dessus parce que pour moi la rémunération c’est les questions que les gens vont me poser.

J’en ai fait sur l’UX strategy et j’en ai fait sur les tests utilisateurs. Les questions que les gens que j’essaie d’accompagner ont formulé m’ont projeté sur des choses que je ne savais pas, il a fallu que je me renseigne et je progresse comme ça.

J’aime bien la confrontation entre pairs, je trouve ça génial même si des fois ça reste un peu conflictuel mais je trouve ça vraiment passionnant.

G : C’est vrai que se rendre à des évènements comme aujourd’hui aux UX Days de Flupa permet aussi de rencontrer des gens plus facilement. 

Au quotidien se confronter à des pairs peut être un frein s’ils sont un peu à droite à gauche, en France ou même dans le monde, donc c’est une opportunité en effet.

Dans cette démarche d’amélioration et de travail auprès d’équipes pluridisciplinaires, est-ce que tu as un outil, une méthode que tu peux conseiller ou que tu utilises régulièrement, qui serait le petit take away de l’épisode ?

E : Alors moi j’utilise souvent le diagramme café, je l’ai présenté lors de la dernière conférence Flupa, c’était un vrai plaisir de présenter ça et surtout les retours des gens qui ont pu l’utiliser, s’en servir et qui continues de s’en servir, ça c’est top.

Le diagramme café est un outil simple qui explique comment est-ce que l’on peut concevoir et organiser les insights clients.

En fait, le diagramme café fait le pont entre la user research et la mise en application de la user research. C’est un outil que j’utilise je pense 3 à 4 fois par mois, facile.

Et puis c’est surtout les gens qui l’utilisent aujourd’hui. Il y a même des gens qui ont fait des templates. Moi je n’en avais pas forcément fait mais j’ai trouvé des templates, avec marqué “Concept Emmanuel Marévéry” (rires). Je suis fan parce que du coup ça veut dire que ça s’est diffusé. J’ai vu des photos aussi tourner là dessus mais que ce soit diffusé et que ça marche c’est chouette.

En gros c’est un outil qui est simple et qui justement, pour répondre à ta question de tout à l’heure, va permettre aux équipes qui ne sont pas dans nos métiers de comprendre la démarche.

C’est simple, c’est fluide, on comprend quels sont les prérequis, on comprend quels sont les moteurs. Et de voir que ça marche sur cet outil là, et bien ça donne envie aux équipes de se dire “Qu’est ce qu’on pourrait faire d’autre”. Et ça, je trouve que c’est plutôt pas mal.

Donc ça c’est mon outil chouchou on va dire.

G : D’accord ok, effectivement tu avais fait une conférence à ce sujet, on peut retrouver la vidéo de la conférence pour avoir plus d’infos et des gens qui ont travaillé le support en téléchargement. C’est vrai que c’est plutôt cool, il est vraiment très sympa à utiliser, je confirme.

Si on se projette vers les années qui viennent, par rapport à l’expérience utilisateur, par rapport à nos métiers, comment tu vois l’avenir de tout ça ? 

Dans quelles nouvelles zones d’action on va arriver, les outils, les technologies qui vont nous aider (ou pas) dans notre milieu professionnel ? Vaste question (rires).

E : La conférence que je viens de faire c’était justement “Comment est-ce qu’on peut prédire” alors que je vais essayer de me prêter à l’exercice moi aussi, même si mon cerveau n’est pas fait pour ça.

Si tous les UX designers partageaient leurs données de tests utilisateur, imagines ce que l’on pourrait faire et améliorer grâce à ça !

Mais en gros l’avenir, je le vois forcément avec la data, les données qu’on va avoir. Moi il y a un rêve que j’ai, je rêverai que tous les UX Designers puissent partager leurs données de tests utilisateur.

Si tout le monde partageait leurs résultats, pas forcément les résultats pour un produit en particulier, mais pour comprendre comment la satisfaction se construit, quels sont les bugs principaux – on a tous relevé des bugs.

Imaginons qu’on crée une énorme base de données avec tous les bugs rencontrés par tous les UX Designers. On se régalerait avec ça. Et ça nous permettrait de concevoir non pas par des tests utilisateur mais par des règles de conception, par quelque chose qui est capitalisé sur tous les tests que l’on a fait.

Pour moi l’avenir il est sur tous ces outils qui sont Open Source, sur lesquels on pourrait partager et à la fois tout ce qui est data pour automatiser la partie de nos métiers que l’on peut automatiser. Et être là en valeur ajoutée pour comprendre, pour expliquer.

Donc pour moi ce “UX et Data”, le thème que je portais aujourd’hui, j’espère que ça va continuer dans le futur et que ça va partir comme ça. Je crois beaucoup à tout ça.

Et après ce que j’aimerais aussi beaucoup, c’est que nos métiers deviennent plus professionnels.

J’interviens en tant que consultante dans des boites mais des fois je fais un peu le service après vente de catastrophes qui sont faites. C’est rare mais ça arrive encore aujourd’hui, où en fait les tests utilisateurs ne sont que des interviews avec des tâches, où il n’y a pas de protocole, ou on fait des statistiques sur cinq personnes.

J’ai une vraie souffrance en tant que scientifique de voir que parfois, il y a du bullshit sur ce qui peut être fait en UX research. 

Ça ne m’empêche pas de faire du bulshit aussi de temps en temps, mais présenter des études sans limites, sans méthodologie, moi ça me gêne un peu. Donc j’aimerais beaucoup que nos métiers se professionnalisent et peut-être se spécialisent dans des branches.

Dans le writing (tout ce qui est écriture), dans le design, ce sont de vrais métiers, et j’aimerais que dans quelques années on puisse se dire qu’on a automatisé les choses qu’on peut automatiser et qu’on est venu apporter de nouvelles méthodologies.

Je crois beaucoup à des méthodes à inventer ensemble et en équipe.

G : D’où est-ce que ça vient d’après toi ce manque de professionnalisation ? Est-ce que tu penses qu’aujourd’hui il n’y a pas de vraies études dans ce domaine, d’écoles ?

E : Si, il y a des très bonnes écoles, d’ailleurs ça c’est pas un souci. Il y a de bons intervenants aussi.

En fait je pense que c’est un métier sur lequel il n’y a pas de référentiel. Il n’y a pas de fiches métiers à proprement parler. D’ailleurs si on regarde les offres d’emplois des fois ça fait assez rigoler, le mouton à cinq pattes classique, la personne qui sait tout faire et tout mal faire. Je pense qu’il y a un socle de “Qu’est-ce qu’on doit être pour être UX” à avoir.

Moi je suis très convaincu que la psychologie, il faut y passer. Je ne me suis pas amusé à reprendre mes études en psychologie parce que j’avais du temps à perdre, au contraire. Mais sans avoir fait mes trois années de licence je pense que j’aurais mal fait mon boulot.

Je suis convaincu qu’il faudra passer par l’apprentissage de connaissances en psychologie.

Parce que c’est un temps de digestion pour comprendre tout ça et même en ayant fait ça, je suis juste au début pour comprendre les articles scientifiques. J’ai jamais la prétention de savoir comprendre tout ça mais au moins, je peux lire ces études là et je peux mieux les comprendre.

Après il y a des bouquins qui sont très bons pour commencer, “Méthodes de design UX”, le livre de Carine Lallemand, il est génial, c’est une super base. Mais après il y a quand même aujourd’hui pour moi une diagonale du vide aujourd’hui dans certaines connaissances.

G : Donc effectivement les prochaines années, on l’espère, vont combler ce vide là avec différentes interventions et différents propos de gens qui parleront dans ce domaine là. 

Peut-être un petit mot avant de conclure sur ton intervention sur le sujet UX et Data ? Qu’est ce qui a provoqué cette envie chez toi de proposer ce sujet à Flupa, de traiter ça ?

E : En fait ce qui est marrant c’est que je me suis appliquée l’UX à moi-même. C’était ma troisième année consécutive à Flupa et du coup plutôt que de pousser un sujet, j’ai regardé déjà ce qui était dit sur les réseaux sociaux.

J’ai vu qu’il y avait beaucoup de personnes qui posaient des questions, notamment dans les pays anglophones, sur l’UX la Data. Je me suis dis que ça devait être tendance. Du coup j’ai fait une shortlist de 7 sujets, j’ai laissé ma communauté choisir et j’ai proposé ce sujet au Flupa.

Donc c’est bien qu’il ait été choisi, je suis vraiment très contente là dessus, c’est un peu la communauté qui l’a poussé et je suis vraiment convaincu que ça, c’est un sujet d’avenir, donc je voulais prendre la parole là dessus.

Après le gros challenge pour moi ça a été de condenser en une demi heure ce que l’on peut dire là dessus, parce que d’habitude c’est plutôt une formation d’une journée que je donne sur ce sujet, parce qu’il y a tellement à dire.

Donc c’était dense, c’est pour ça que j’ai essayé de mettre rapidement à dispo le support. Mais pour moi c’est vraiment un sujet sur lequel on doit se préoccuper et se positionner, je pense le plus rapidement possible avant que ça nous passe devant. Parce que sinon ce sont d’autres métiers qui vont s’accaparer le sujet.

G : Ok, en tout cas elle était effectivement très intéressante, très riche et pleine de choses à picorer pour les mois à venir je pense, il y a du matériel (rires).

Une dernière question pour clôturer cet épisode, est ce que tu as une inspiration, un truc qui t’as, on dit d’ordinaire “bluffé”, qui t’as inspiré dans ton travail, dans ton environnement que ce soit professionnel ou créatif, ces derniers temps ?

E : Récemment j’ai rencontré sur une conférence des collègues, qui avaient des spécialités dans l’intelligence artificielle. Les discussions, on n’a pas parlé longtemps, mais moi ça a fait pop-corner mon cerveau pendant des journées et des journées (rires).

Et ça c’est inspirant pour moi, il n’y a rien de mieux dans nos métiers que les échanges entre pairs et c’est vraiment quelque chose qu’il faut continuer à avoir. On est sur des métiers où on est en général généreux, là où sur de l’ingénierie on va plus garder nos choses pour nous, parce qu’il y a des notions de brevets, etc.

Il n’y a rien de mieux dans nos métiers que les échanges entre pairs, c’est vraiment quelque chose qu’il faut continuer à avoir.

Sur l’UX les gens parlent et ça pour moi il faut que ça reste parce que c’est là ou on va s’inspirer.

Franchement moi j’ai besoin de ça, je suis freelance toute seule dans mon coin, dans la campagne Montpelliéraine, sans ces échanges entre pairs je pense que je changerais de métier.

G : Ok, l’intelligence artificielle, prochain sujet peut-être d’intervention ?

E : Avec grand plaisir (rires).

G : Je te remercie d’avoir pris ce temps ensemble !

Où est ce qu’on peut te retrouver si on a envie de te suivre, de voir tes travaux, et tes slides par exemple ? 

E : Alors je vais essayer d’être active sur LinkedIn pour que vous puissiez avoir mes slides. J’ai aussi un compte Twitter sur lequel il y a des slides mais je suis plus active sur LinkedIn.

En tout cas je m’évertue à répondre à toutes les questions qui me sont posées, parce que je passe toujours quelques heures par semaine à faire du bénévolat, à accompagner justement des juniors ou des séniors, voilà.

J’aime beaucoup aussi échanger sur tout un tas de questions, n’hésitez pas.

G : Ok et bien merci encore !

Nous on se retrouve sur un prochain épisode de Salut les Designers, salut à tous et à toutes !

Les ressources de cet épisode

UX Days

Évènement international francophone incontournable porté par Flupa et dédié à l’expérience utilisateur, avec des ateliers pratiques et des conférences inspirantes.

Site : Flupa UX Days 2021

Comportement du consommateur

De Joël Brée.

Le consommateur est un être complexe, au comportement souvent imprévisible et changeant. Il est difficile de l’attirer, et plus encore, de le fidéliser.

Livre : Le comportement du consommateur – Livre et ebook Marketing – Communication de Joël Brée

Méthodes de design UX

De Carine Lallemand et Guillaume Gronier.

A-t-on encore besoin de présenter le livre référence pour bien débuter avec les méthodes de conception centrée utilisateur ? Méthodes de design UX, c’est 30 méthodes fondamentales pour concevoir des expériences optimales, leur déclinaison “guérilla” et des retours d’expériences concrets.

Livre : Méthodes de design UX – Carine Lallemand , Guillaume Gronier -…

Conférence Le diagramme Café

De Emmanuelle Marévéry

Découvrez le diagramme Café d’Emmanuelle, un outil simple pour organiser les insights clients.

Replay : Flupa UX Days 2018 Emmanuelle Marévéry Diagramme café

Slides : Le diagramme Café ! Les slides – Emmanuelle Marévéry

Conférence UX + Data = ❤️

De Emmanuelle Marévéry

La conférence donnée par Emmanuelle pendant les Sunny Tech 2019 à Montpellier sur les bénéfices liés à la data et l’UX, pour optimiser et automatiser et ainsi gagner du temps utile pour le conseil (le vrai).

Replay : [Sunny Tech 2019] UX + Data = Love

Le support de sa conférence